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2 mai 2011 1 02 /05 /mai /2011 12:30

Les partisans du retour à une forme d’Etat belge unitaire rêvé, uniquement francophone (et impossible) ou pire, recomposé au départ d’un amalgame composé de Flamands minoritaires localement (Bruxellois et « périphériens ») de germanophones et Wallons continuent à tenir le haut du pavé médiatique. C’est pourtant entretenir par là le foyer des discordes. Entretenir des conflits - dits communautaires - heureusement froids jusqu’ici -basés sur l’incohérence entre territoire et langues. Langues qui sont le fondement des cultures. Cultures qui, elles-mêmes, si elles sont suffisamment fortes, étant par l’homogénéisation qu’elles apportent le vrai ciment des peuples et des nations.

 

Ce n’est pas qu'un problème belge. L’Union européenne, basée sur l’idée généreuse d’un projet qui aurait éliminé toute confrontation n’aboutit-elle pas actuellement à l’inverse. Les effets de la supranationalité ayant éliminé de fait toute émulation, de l’Union européenne, gouvernée par des équipes assez soustraites au contrôle démocratique et protégées par la complexité de ses rouages, on peut se demander si  elle n’est pas en train de reproduire les erreurs du modèle soviétique. La perte de compétitivité et la désindustrialisation rapide de la plus grande partie de l’Europe, des déséquilibres qui ne cessent de s’aggraver dans les échanges intra-européens, des finances publiques dégradées et impossibles à redresser, une austérité à « l’allemande » qui, si elle est appliquée, risque de plonger l’Europe dans la récession… a déjà pour conséquence de dresser les peuples d’Europe les uns contre les autres. Pensons au succès scabreux et malsain de l’expression « PIIGS » qui désigne, on le sait, les pays les plus en difficulté de la zone euro : Portugal, Irlande, Italie, Grèce, Espagne (Spain).

 

Au rebours des idées faciles selon lesquelles il suffit de mettre les gens ensemble pour qu’ils fraternisent, on peut observer que la promiscuité généralement les divise. Dans un cas comme dans l’autre, qui osera quitter le domaine de l’idéologie et dire que le roi est nu ? J’entends régulièrement regretter que l’on n’ait plus « d’hommes d’Etat », mais n’est ce pas logique quand « il n’y a plus d’Etat » ?

 

S’il n’est pas question de remettre en cause, ici, le principe européen, rien n’empêche d’en espérer une refonte radicale. L’Europe unit des Etats qui perdent leur souveraineté, non pas en fonction d’un but commun auquel ils auraient consentis, mais parce que la conjugaison de l’organisation européenne et de l’idéologie néolibérale (qui n’a rien à voir avec le libéralisme des Lumières), ne les ont fait échapper à la guerre et (partiellement) à la servitude étrangère, que pour les plonger dans la servitude à l’égard des « marchés » et dans la guerre commerciale. Dans ce contexte, le réveil de l’institution étatique redevient souhaitable. Et le retour des nationalismes, hormis certains excès, ne signifie nullement le retour aux vieux antagonismes nationaux. La dynamique du progrès sera mieux préservée si coexistent des entités nationales dont la diversité laissera libre cours à plus d’expériences. Tout en limitant chaque fois ce qu’elles auraient d’excessif, les leçons de l’Histoire ayant fortement marqué les esprits. L’émulation, la confrontation, ne se traduisant pas par guerre, étant la base de la dynamique même du progrès tant moral que matériel. (*)

 

Globalement, et tenant compte du contexte international, nous pourrions imaginer un modèle plus proche de la Renaissance que celui de Charlemagne. Libre-échange et circulation, recentrage sur les Etats cohérents, mais aussi rôle des régions ou des cités-états, ou d’ensembles moins rigides… Les identités régionales, non antagonistes des états auxquelles elles appartiennent, étant ici des vecteurs importants. Les arbres poussent haut et droit lorsqu’ils ont à se disputer l’air et la lumière. Tandis qu’un arbre isolé se rabougrit, car il n’a pas à lutter dans sa solitude. Ce qui a été le cas de la Wallonie endormie dans l’expérience belge.

 

Comme la Flandre, mais qui, elle, s’est créée sa légende de toute pièce, la Wallonie a intérêt à inscrire son avenir dans cette dynamique néo-nationale s’inspirant de ce qu’écrivait déjà Emmanuel Kant en 1795 dans « Zum ewigen Frieden » ? :

« L’idée du droit des gens suppose la séparation de beaucoup d’États voisins, indépendants les uns des autres, et bien qu’une condition de ce genre constitue déjà en soi un état de guerre (si toutefois une union confédérative ne prévient pas l’ouverture des hostilités), cette condition vaut mieux néanmoins, suivant l’idée rationnelle, que la fusion de ces États opérée par une puissance qui l’emportant sur toutes les autres, se transforme en une monarchie universelle ; les lois, en effet, à mesure que le gouvernement acquiert de l’extension, perdent toujours plus de leur force, et un despotisme sans âme, tombe après avoir extirpé les germes de bien, finalement dans l’anarchie. C’est pourtant le désir de tout État (ou de son souverain) de parvenir de cette manière à une paix durable, c’est-à-dire en gouvernant, si possible, toute la terre. La nature cependant veut qu’il en soit autrement. Elle utilise deux procédés pour empêcher la fusion des peuples et pour les séparer, à savoir, la diversité des langues et des religions. Cette diversité entraîne, il est vrai, avec elle, le penchant à des haines réciproques et des prétextes de guerre, mais conduit d’autre part, avec les progrès de la civilisation et le rapprochement graduel des hommes vers une harmonie de plus en plus grande dans les principes, et une entente dans un état de paix, qui n’est point produit et garanti comme le précédent despotisme (sur la tombe de la liberté) par l’affaiblissement de toutes les forces, mais au contraire, par leur équilibre et l’émulation la plus vive. »

 

Un texte qui reste d’une criante actualité.

 

(*) J'avais déjà répondu anticipativement à cet argument dans ce billet.

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