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3 février 2014 1 03 /02 /février /2014 05:13

Les médias le disent… Depuis ce WE et plus singulièrement  le congrès de la N-VA, la campagne est lancée.

Réflexions…

Tout d’abord, il faut faire remarquer que grâce à la globalisation des scrutins (fédéral, régional et européen), les messages vont être brouillés. C’est là un coup de génie de ceux qui s’opposent à toute évolution institutionnelle dans ce pays puisqu’il se dit que l’enjeu des élections se situe au fédéral. On peut légitimement estimer que le dosage entre programmes socio-économiques et réformes diverses va probablement pencher en faveur du premier, sauf peut-être en Flandre. Deux types de scrutin donc.  Bon ou mauvais calcul pour les défenseurs de l’ancienne Belgique, l’avenir nous le dira.

Mais malgré tout, nous pouvons être optimistes. Le passé nous montre que les partis traditionnels (partis de pouvoir) se sont depuis toujours ingéniés à retarder les réformes « pour sauver la Belgique. Ils ont ainsi été successivement contre la reconnaissance du fait flamand en Flandre, contre le fédéralisme, n’acceptant les réformes que quand il était trop tard et s’ingéniant à essayer de les rendre inopérantes par des transferts de compétences incomplètes ou peu cohérentes. Il va bientôt en être de même avec le confédéralisme qui leur sera imposé en attendant mieux.

En réalité, il y a fort longtemps que la campagne est lancée,  mais en toute discrétion.  Une presse aux ordres qui ne diffuse que de bonnes nouvelles (hors faits divers). Un nouveau roi  - désigné in tempore non suspecto - pour ne pas devoir modifier le système monarchique (ou alors de manière cosmétique) garant de la « stabilité ». Une communication gouvernementale omniprésente pour dire que la Belgique est le seul pays d’Europe (et de l’univers ?) à se sortir de la crise bancaire avec les honneurs (sauf que…  la dette publique… la rigueur…  la pauvreté… etc…). Rien que de bonnes nouvelles…

Ceci dit, les analystes politiques (*) ne semblent que peu relever que la stratégie de retardement laborieusement élaborée semble bien en passe d’être contournée.  Et c’est là qu’il faut admirer l’habileté manœuvrière d’un De Wever qui connaît bien l’Histoire.

Je vois ça en deux temps.

Tout d’abord, jouer la carte du duel. N-VA contre PS. Coup de génie puisqu’il oblige les autres partis, tant flamands que « francophones » (il n’y en pas vraiment d’autres… hélas !) à se positionner par rapport aux deux « grands » pour espérer exister encore. Or, on sait que quand il y a un duel, les autres existent très peu.

Conséquence…

En Flandre, les « laissés pour compte » sont obligés de sortir un programme « light » (pour parler « francophone ») en proposant, par exemple, un « confédéralisme positif » dont on voit mal en quoi il différerait de l’original de la N-VA qui a le mérite d’être dans la droite ligne des revendications du Mouvement flamand. Ou encore en élaborant un programme socio-économique calqué sur celui du meneur. A la guerre, celui qui attaque le premier a toujours l’avantage.

En « Fédération Machin-Chouette », sans rien faire, grâce à la diabolisation médiatique de la N-VA, le PS joue sur du velours. Ajoutez à cela un premier ministre hyper communicant, des libéraux partagés entre l’envie d’aller au pouvoir et en même temps la peur d’y devoir accepter de nouvelles réformes institutionnelles… Les autres n’étant déjà plus là que pour mémoire… sauf à Bruxelles, mais bon…

Donc, comme annoncé, on peut légitimement pronostiquer – à ce jour - deux vainqueurs, un dans chaque « communauté ». Résultats fort différents et donc…

Ensuite, si ce fabuleux coup de poker réussit, imposer un scénario de scission à la tchécoslovaque.

Repassons-nous les faits de 1992…

1. Deux vainqueurs radicalement différents sortent des élections de juin 1992 destinées à renouveler le Parlement.  En République tchèque, le Parti démocratique civil réclame un Etat fédéral fort et fonctionnel.  En Slovaquie, c’est le Mouvement pour la Slovaquie démocratique, luttant pour l’émancipation du peuple slovaque et prônant le confédéralisme, qui l’emporte.

2. Le 20 juin, après (seulement !) cinq cessions de pourparlers, les négociations entre les deux échouent et l’impasse est actée.

3.  Le 17 juillet, le Conseil National Slovaque proclame sa déclaration de souveraineté.

4.  Le 20 juillet, le président Havel démissionne avant le terme de son mandat et l’assemblée fédérale se trouve dans l’incapacité de réélire un autre président.

5.  Le 23 juillet, un Gouvernement fédéral restreint et paritaire est formé pour gérer les affaires courantes.

6.  Le 28 juillet, le Gouvernement slovaque approuve un projet de constitution que le Conseil national slovaque adopte le 1er septembre, à 114 voix sur 150.

7.  Le 25 novembre, l’assemblée fédérale approuve la Loi constitutionnelle sur la dissolution de la République fédérative tchèque et slovaque pour le 1er janvier suivant. La séparation est donc actée par voie constitutionnelle.

8.  Le 16 décembre, deux semaines avant l’indépendance, le Conseil national tchèque approuve la constitution de la République tchèque.

 Il n’aura donc fallu que 6 mois pour que le processus d’indépendance se concrétise.

 

Certes, on me rétorquera que les conditions sont fort différentes.

D’abord, Les partis ne sont pas limités à un territoire bien délimité mais s’adressent à des communautés linguistiques aux contours difficilement discernables.

Ensuite, en conséquence, il y a le cas bruxellois.  Région historiquement flamande, elle s’est assez bien francisée et le français y reste la lingua franca d’une grande partie de la population. Mais cette population n’y est pas homogène, composée en grande partie de nouveaux belges, elle pourrait – comme les bruxellois « de souche » - faire le choix du portefeuille. Alors que Prague était composée de Tchèques et située en Tchéquie.

La PS est et reste un parti de type communautaire et les régionalistes (wallons, mais aussi bruxellois) y restent marginalisés  depuis les purges menées par Di Rupo. Mais rien ne dit qu’un sursaut ne puisse y apparaître.

Malgré les différentes réformes, la Belgique reste (surtout dans les esprits) un Etat hyper-centralisé et de construction plus ancienne que la Tchécoslovaquie qui ne datait que de 1918.

Dans l’Etat Tchécoslovaque, la Sécurité sociale était déjà séparée entre les deux entités, mais la dernière réforme a permis des avancées dans ce sens.

La Justice était scindée, à l’exception de la Cours suprême.

La dette publique était faible (10% contre 100%...)

Les relations économiques entre les deux entités étaient faibles.

Les Slovaques étaient moins nombreux et moins riches (31% de la population, tiens-tiens…) et ont toujours manifesté une revendication autonomiste (les Wallons ont un peu abandonné cet aspect, mais rien ne dit…). Les Tchèques, plus prospères et plus nombreux, on cependant participé pleinement au processus de démantèlement dans lequel ils n’avaient rien à perdre économiquement.

Tous ces éléments montrent que s’il est difficile de penser à une transposition littérale à la situation belge, il n’en reste pas moins vrai que – puisqu’aucun cas n’est identique – la manière dont ce pays s’est scindé apparaît comme la voie qui aurait le plus de chance d’orienter une évolution séparatiste de l’Etat belge.
Il s’agit d’une solution pacifique, négociée, où aucune partie n’assume le « mauvais rôle », où la volonté est d’éviter la rupture des relations entre les anciens partenaires par la conclusion de multiples accords bilatéraux et où l’objectif partagé est l’intégration rapide des nouvelles entités dans les instances internationales.

Solution pacifique et négociée puisque

- Aucun des deux Etats n’a revendiqué d’être l’unique continuateur de la Tchécoslovaquie, ce qui accrédite la thèse de la dissolution. Le déroulement pacifique et concerté de la séparation n’accréditait pas l’idée d’une scission ou d’une sécession.  Le 29 octobre 1992, les premiers ministres des deux gouvernements avaient signé 16 accords sur les différents domaines de la future coopération bilatérale (union douanière, système monétaire, frontière, visas …). Ce faisant, l’Etat tchèque se comportait, lui aussi, de façon inconstitutionnelle et participait, de la sorte, à la dissolution définitive.  

La modification de la constitution tchécoslovaque n’a, finalement, fait qu’acter une situation de dissolution (et non sécession) de fait.

Comme ça pourrait-être le cas en Belgique, aucun référendum n’a été organisé pour demander l’avis de la population. Des réserves ont bien été émises par la Communauté internationale, elles  n’ont cependant pas invalidé la décision tchécoslovaque, notamment en raison de la tradition de démocratie indirecte et représentative de la Tchécoslovaquie.

Le cas tchécoslovaque a confirmé la règle coutumière du droit international selon laquelle les traités territoriaux fixant les frontières dans des situations de la succession d’Etats sont considérés comme maintenus en vigueur (**)

De nouveaux Etats impliquent de nouvelles nationalités. Ces questions furent réglées par des lois approuvées par les deux républiques, après la scission du pays.  Auparavant, le droit tchécoslovaque prévoyait déjà l’existence pour l’usage interne de deux nationalités, seule la nationalité tchécoslovaque étant toutefois pertinente pour le droit international. Les nouvelles lois prévoient que les personnes qui avaient précédemment acquis l’une des deux nationalités selon la loi antérieure voient celles-ci automatiquement prolongées dans le cadre du droit international.

Les deux nouveaux Etats ont ensuite adopté deux approches différentes en matière de maintien ou d’acquisition de la nationalité répondant à des intérêts propres. Mais deux approches tout aussi légales l’une que l’autre.

 

En matière d’appartenance aux instances internationale, c’est la voie du compromis qui a été suivie.
Vu que vu que les deux nouveaux pays étaient les successeurs de la République fédérale de Tchécoslovaquie, ils devaient, théoriquement, prendre à deux l’unique place de l’ancienne Tchécoslovaquie.

Ainsi fut-il prévu avant la séparation que, dans le cas où un seul des pays accédait à une instance internationale, il soutiendrait l’adhésion de l’autre. Dans la plupart des cas, les deux Etats ont dû se soumettre à une nouvelle procédure d’adhésion mais très simplifiée. Ils ont donc dû postuler pour (ré)intégrer des organisations , ce qui s’est fait très rapidement.

 

Reste le problème de la dette… Jugée ici être un obstacle insurmontable. On l’a vu, la dette n’était guère importante (10 % du PIB) et des relations « amicales » existaient entre les deux nouveaux Etats. La répartition n’a donc pas posé de problèmes insurmontables et a, là encore, été réglée avant la séparation par la modification de la constitution.

Nul doute que la créativité dont on a fait montre jusqu’ici pour maintenir en vie un Etat moribond et impossible, si elle est correctement canalisée doit pour voir venir à bout de ce problème.

En historien compétent, fort de ce précédent historique, De Wever pourrait amener son partenaire PS sur une voie de dissolution douce de la Belgique. D’autant plus facilement que les experts de l’IEV ont certainement déjà planché sur le sujet.

Les partis flamands (à part les belgicistes de Groen et du PVDA, combien de divisions ?) ne peuvent qu’être preneurs. On imagine mal que les partis « francophones » ne suivent pas. Leur appétit de pouvoir est trop grand pour les traditionnels et les autres… Ecolo est en perte de vitesse, le PTN-GO, comme le FN (ou ce qui en sert) le FDF et le PP restent unitariste mais ne devraient  pas cartonner. Il n’y a pas de parti wallon capable de jouer dans le jeu, hélas quant au RWF, il se refuse à toute éventualité de participation à quoi que ce soit et est donc parfaitement inutile. Comparaison n’étant pas raison, comme le Vlaams Belang, il s’est mis en dehors du jeu.

Vivement le 26 mai !

Certes, il s'agit là de politique fiction, mais
... 

Et pour vous montrer qu'il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis, et que c'est même parfois le contraire, je vous offre et ancien tract... Et si vous avez la curiosité de cliquer sur l'image, vous pourrez lire le compte rendu de la séance du 14 mai 1988 de la Chambre des Représentants où vous trouverez le texte complet en page 17.
DiRupo.jpg 

(*) Comment peut-on lire, dans un « grand » quotidien de la capitale, qu’un  politologue « officiel » déclare à propos du Congrès de la N-VA: «La clarification attendue n’a pas eu lieu» ?  Alors que dans l’Echo, on trouve ceci qui me paraît plus coller à la réalité : « Le message depuis le congrès de la N-VA est limpide. »

 

(**) Convention de Vienne de 1978 sur la succession d’Etats en matière de traités, article 11

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