Nous assistons en ce moment à un retour médiatique du MR. Logiquement dans son rôle d’opposition et n’étant pas convié à la table de négociation, ce dernier juge très sévèrement les négociations en cours.
D’après ceux qui se sont exprimés, le MR aurait mieux défendu les intérêts des francophones (encore faut-il définir ce qu’il entend en utilisant ce terme non spécifique) dans la négociation s'il y avait été invité. « Il est tout de même curieux que le premier parti à Bruxelles et le deuxième parti en Wallonie ne soit pas associé » précisent-ils avec une touchante unanimité...
Voire ! Si mes souvenirs sont bons, De Wever était plus que favorable à la présence du MR à la table de négociation… Malgré la présence des ultras du FDF et pas uniquement parce que ce parti est de centre droit.
Fallait-il inviter le MR ? La politique ne se fait jamais sur base de bons sentiments, mais sur des rapports de force. Le MR a perdu les élections et si je compte bien, les partis francophones autour de la table représentent 62 % des élus francophones de BHV. Soit les deux tiers malgré les voix de cet arrondissement qui se sont perdues pour faire élire un personnage de l’ultra-droite – pour ne pas dire plus - en Brabant wallon par le biais de l’apparentement. (Et c’en est un fameux de biais !).
En face, les seuls CD&V et N-VA totalisent 44 élus flamands sur 88, soit exactement 50 %. Les 18 élus du SP.A et de Groen ! qui font l’appoint permettent de dépasser, là aussi, les deux tiers. Sans compter l'appui extérieur des... libéraux.
Les Flamands de BHV sont représentés, eux, par 78 % de leurs élus.
Pour aller plus loin, les deux camps sont donc largement représentatifs des deux communautés. Si l’on se base sur la seule Région clairement délimitable, les Wallons sont représentés par 35 élus sur 49, soit 71 %. Notons qu’il en va de même pour la Flandre (hors BHV) représentée par 56 élus sur 79, soit là aussi : 71 %.
La principale pierre d’achoppement étant les limitations de la Région de Bruxelles et son financement, la répartition des négociateurs des partis représentatifs des bruxellois - tant Flamands que Francophones - autour de la table est donc équitable et démocratique. Difficile de trouver d’autres marges de manœuvre compte tenu des résultats électoraux. C’est le choix logique du pré-formateur qui a privilégié les partis gagnants en premier. Ce qui n’a pas toujours été le cas dans le (proche) passé. Combien de majorités composées de battus aux élections n’ont-elles pas gouverné ?
Je peux comprendre la déception de ceux qui ne sont pas de cette négociation, mais toute autre considération ressort de la logique partisane. C’est le jeu.
Difficile d’en dire plus à cette heure sur les résultats. Nous n’avons – en tant que citoyens ordinaires - que peu d’informations sur les acquis des négociations. Certes, on est en train d’organiser une très grande réforme de l’Etat, il semble bien y avoir trop d’avancées pour dire arrêter, mais pas assez pour dire avancer vraiment.
On entend dire qu’on a parfois l’impression que les Flamands ont tout demandé et tout obtenu. Mais si on analyse concrètement le programme électoral de la N-VA, on se rend compte que c’est loin d’être vrai. Ecolo, Groen !, le CdH et le SP.A jugent qu’il y a suffisamment d’éléments sur la table pour un « compromis honorable ». Le CD&V aurait « vendu son âme au diable » en 2007 pour obtenir le dixième de ce qui est sur la table aujourd’hui. Aucun des ténors bruxellois du PS ne se manifeste. Certes, on peut efectivement considérer que les partis francophones ont fait des concessions. Mais les Flamands avaient des revendications précises et nombreuses. Les « francophones » n'étaient « demandeurs de rien » suivant l'expression inventée par Monsieur Maingain (du MR !) (et reprise bêtement par tous les autres). Dans toute négociation, surtout si les points de vue sont diifférents, chacun doit céder un peu. Quand on part de rien, on ne peut que reculer.
Attendons de juger sur pièce. Tout en nous réjouisant des avancées en matière d'autonomie pour la Wallonie.
Quelles que soient les péripéties à venir, les acquis de cette négociation serviront de socle aux prochaines.
Mise à jour : Suite à ce que j’écrivais ci-dessus et à la conférence de presse de Di Rupo de ce matin, entre le compromis ou le chaos, le choix semble… simple !
Décidément, « l'Histoire du futur » reste à écrire.