Que dit cet article ?
« Le pouvoir législatif fédéral a le droit de déclarer qu'il y a lieu à la révision de telle disposition constitutionnelle qu'il désigne.
Après cette déclaration, les deux Chambres sont dissoutes de plein droit.
Il en sera convoqué deux nouvelles, conformément à l'article 46.
Ces Chambres statuent, d'un commun accord avec le Roi, sur les points soumis à la révision.
Dans ce cas, les Chambres ne pourront délibérer si deux tiers au moins des membres qui composent chacune d'elles ne sont présents; et nul changement ne sera adopté s'il ne réunit au moins les deux tiers des suffrages. »
Les articles suivant sont de la même eau, mais prêtent moins à débat puisqu’ils prévoient l’impossibilité de révision en cas de guerre, d’absence de Parlement ou de régence. Ce sont tous des freins ou des garde-fous à des modifications de ce texte.
On le voit, il s’agit d’une procédure lourde, en 3 temps. D'abord, une déclaration de révision pour identifier des articles qui pourraient être révisés. Ensuite, les élections, dont le résultat n'est (théoriquement) pas par hypothèse prévisible. Et enfin dans une troisième séquence, sous la législature suivante, un acte de révision à des majorités des 2 tiers. Le problème, c'est évidemment cette coupure par les élections entre les 2 phases. Considérée comme un verrou à certaines avancées en matière communautaire, de justice, de compétences d’emploi, de finances par certains (les partis flamands en général). Comme une sage précaution par d’autres. Il est vrai, à la décharge des défenseurs du statut quo que l'histoire des réformes successives de l'Etat a montré la puissance du mouvement flamand et euh… disons la fragilité de la cohésion du conservatisme des partis de pouvoir francophones.
D’aucuns se méfient aussi d’eux-mêmes et de la discipline de parti existant en particratie. La révision donnant à un certain nombre de milieux politiques la possibilité de changer les règles du jeu, et notamment les règles de répartition de compétences, par le biais d'une loi votée à une majorité qualifiée, sans qu'il n'y ait au préalable une dissolution des Chambres. Comme ça s’est fait lors des accords de la « Saint Polycarpe ». Et ils ont raison.
On pourrait leur rétorquer que dans une saine logique démocratique, la déclaration de révision devrait permettre un débat électoral et donc une participation des citoyens à la discussion… Ou mieux, une procédure référendaire avec un débat contradictoire et une égalité de moyens d’argumentations...
Mais ne rêvons pas, nous sommes toujours en Belgie-que. La participation des citoyens fait peur depuis 1950.
En France, de Gaulle avait contourné la puissance des partis politiques en ouvrant le jeu démocratique dans la Constitution de la Vème république en institutionnalisant l’'un des principaux instruments de la démocratie directe : le référendum obligatoire non seulement pour les questions législatives, mais aussi pour les matières constitutionnelles. On l’a vu, celui-ci permet au citoyen de participer véritablement à la politique. Et avec quelle passion. Et quelle maturité. Les exemples récents nous le montrent, que se soit sur la monnaie unique ou sur le projet de traité instituant une Constitution européenne. La démocratie directe ne remplace pas la démocratie représentative. Elle complète celle-ci et force les hommes politiques à examiner et écouter plus attentivement les aspirations des citoyens.
Pourtant chez nous, la grave crise de confiance appelle de profondes réformes. Seules une nouvelle culture politique ainsi qu'une démocratisation et une modernisation poussées du système politique pourraient rétablir la confiance dans les institutions. Mais je pense sincèrement qu’il est trop tard, la Belgie-que n’est plus un pays et n’a jamais été une nation.
Dans l’absolu, l'une des principales causes de l'apathie politique qui sévit depuis des années doit être cherchée dans le manque de participation du citoyen. Une démocratie purement représentative ne peut plus suffisamment répondre à ce besoin accru de participation. En effet, depuis quelques décennies, notre société s'est profondément transformée. Les citoyens sont devenus adultes, ont une meilleure formation et sont mieux informés. En principe, mais ça se discute. Simplement parce qu’il n’y a pas d’indépendance des médias par rapport au pouvoir des partis.
Pour permettre aux citoyens de participer véritablement à la politique, il conviendrait de compléter la démocratie représentative et de l'enrichir par des systèmes de démocratie directe. Mais bon…
Oui, réviser cet article peut être dangereux dans une logique ou tous les pouvoirs restent confiés aux mains des partis et, à défaut de procédure référendaire pour ceux qui se méfient du Peuple. Se cacher derrière la crainte de voir les Flamands se choisir un avenir à eux n'est pas un bon prétexte.