Dans un des forums (fora ?) (*) de « La Libre », une intervention, sous le titre « Salauds de Français », relate l’anecdote suivante : La fillette de 11 ans d’un liégeois installé aux Etats-Unis d’Amérique interrogée sur l'histoire de la Belgique par son enseignante américaine, aurait notamment répondu au sujet des langues : "On parle le français en Belgique parce qu'après l'invasion française, ils nous ont interdit de parler le belge."....
Evidemment, déferlement immédiat de commentaires xénophobes de la part de courageux anonymes qui ont fait de l’anti-France leur ordinaire.
La réaction de cette enfant mérite pourtant réflexion. Comment en est-elle arrivée là ? Est-elle si extraordinaire ? Est-ce étonnant ?
Dans les médias ou les cours d’histoire, on parle d’invasions, d'occupations, de régimes et de périodes...
Pour les plus récentes et allemandes (1914-18 & 1940-45) les termes d'invasions et d'occupations sont de mise. Peut-être parce qu'on se souvient (encore un peu) des exactions commises. Et qu’à l’époque, la Belgique avait une existence officielle. Reconnue par la Communauté internationale.
On y utilise aussi généralement le terme d'occupation française (plus rarement d’invasion, je le reconnais volontiers) pour parler des années comprises entre 1792 et 1815 mais, par contre et fort curieusement de période hollandaise pour les années suivantes (1815-1830) ou de période espagnole, période autrichienne, etc... pour les années antérieures.
Et pourtant :
Pour les Espagnols, par exemple, c'est effectivement fort ancien, il n'y avait que des sujets à l'époque, pas encore de conscience citoyenne ou de sentiment d'identité collective. Ceux-ci n'apparaîtront qu'après 1789. L'Europe et singulièrement nos régions n'étant que des champs de batailles. Des croisements d'influences pour les princes prédateurs qui se partageaient des territoires.
Mais, en ce qui concerne les Autrichiens et les Hollandais, ils ont été bel et bien été chassés par des patriotes et, pour les derniers occupants, avec l'aide (23 déc. 1832) des troupes françaises du maréchal Gérard. (C'est historique. On lui décerna même le titre de « libérateur de la Belgique » et fut nommé Grand Croix de l'ordre de Léopold tandis que la Chambre – belge - lui vota une épée d'honneur en or !)
Si les Français, eux (et on peut discuter des circonstances défensives qui les ont amené à intervenir en 1792), ont aussi été « chassés », c'est par les troupes coalisées des despotes d'ancien régime. Et contre l’avis des populations. Celles de Wallonie en tous cas. (C'est historique aussi... Rappelons-nous les Namurois (et les Namuroises !) qui ont héroïquement couvert la retraite du corps d’armée de Grouchy vers Givet en 1815 en retenant les Prussiens de Blücher...).
Bref, le choix des mots n'est jamais innocent. Ni le contexte dans lequel ils sont utilisés. Ceux qui ont étudié les techniques de propagande le savent bien. "Période" a un caractère moins péjoratif, moins agressif qu'occupation évidemment. Plus doux, plus... naturel, plus... anodin, en somme !
Curieux ? Non, c'est voulu !
(*) Peut-être devrait-on plutôt parler de « foirum » pour ce qui est souvent un défouloir de l’anti-politisme primaire ou de la xénophobie ordinaire sous courageux couvert d’anonymat…
David Descamps 04/05/2007 14:00
Claude Thayse 08/05/2007 12:29
François 23/02/2007 12:23
Claude Thayse 23/02/2007 13:59
Jacques DefroyÚre 22/02/2007 17:05